Alex Mayberry, chef du restaurant de l’auberge Shadow Lawn Inn à Rothesay, près de Saint John, partage ses secrets pour la cueillette de plantes, de champignons et de fruits sauvages comestibles au Nouveau-Brunswick.
Quels aliments sauvages comestibles peut-on trouver au Nouveau-Brunswick?
Le Nouveau-Brunswick réunit les conditions parmi les meilleures au monde pour la cueillette en nature. Ici, il ne fait ni trop chaud, ni trop froid. Les averses printanières arrosent bien le sol, la chaleur et l’humidité de l’été favorisent la croissance végétale et la belle brise saline de la baie de Fundy nous garde au frais.
Chaque mois de l’année, la nature nous offre de quoi faire une cueillette : champignons chaga et aiguilles de pin blanc en hiver, morilles, crosses de fougère (têtes de violon), ail des bois et bourgeons en début de printemps et une abondance de fines herbes, plantes, fruits et champignons sauvages en été et en automne.
Au Nouveau-Brunswick, on peut trouver des champignons sauvages comestibles parmi les plus rares et les plus recherchés. Nous avons réellement l’embarras du choix : la fugace morille, la chanterelle corne d’abondance, le polypore soufré, le maitake, le matsutake, la russule orangée (aussi appelée champignon crabe ou champignon homard), la chanterelle, le cèpe d’Amérique, et j’en passe.
Nos régions côtières offrent également des trésors du littoral comme le petit goémon (dulse), mondialement reconnu, la salicorne, les pois de mer, la camarine, l’airelle, le bois-sent-bon, les senelles, la laitue de mer et bien plus encore.
Enfin, comment oublier toutes les baies sauvages qu’on peut dénicher dans les champs et les forêts du Nouveau-Brunswick? Fraises, framboises, bleuets, mûres, groseilles à maquereau, gadelles rouges et noires, baies de sureau et même l’un des petits fruits les plus rares du monde : la chicouté — quel fabuleux festin forestier!
Y a-t-il une saison de la cueillette sauvage? Si oui, que peut-on cueillir et quand doit-on y aller?
Le printemps est la saison des nouvelles pousses, et donc le début de la saison de la cueillette. C’est magique de voir des petits bourgeons vert tendre apparaître après un dur hiver. En mars, on commence en force par la saison des sucres en entaillant nos érables. Côté cueillette, les têtes de violon, l’ail des bois, les bourgeons d’épinette et les morilles sont quelques-uns de mes aliments comestibles printaniers préférés.
L’été et l’automne regorgent de possibilités de cueillette! Tout comme dans le jardin, la récolte sauvage est habituellement beaucoup plus abondante lors des jours chauds de l’été. Les plantes, fruits, fleurs, champignons, fines herbes et légumes sauvages se multiplient sous les rayons du soleil.
Doit-on avoir une certaine expertise pour la cueillette sauvage, ou est-ce accessible à tous?
Pour avoir du succès, il faut acquérir quelques connaissances de base. Au début, la recherche de nourriture en pleine nature peut sembler intimidante, mais avec un peu de pratique, beaucoup de patience et un esprit ouvert, vous serez surpris par la quantité d’aliments qui ne demandent qu’à être cueillis. Cela étant dit, je dois insister sur un point : ne consommez rien dont vous n’êtes pas absolument certain de la comestibilité. Certaines espèces peuvent avoir l’air semblables à ce que vous avez vu en photo, mais elles sont peut-être des sosies toxiques. Il existe des plantes vénéneuses au Nouveau-Brunswick, et certaines d’entre elles peuvent être mortelles.
Ne vous laissez pas décourager cependant. J’ai moi-même commencé à faire de la cueillette sauvage il y a cinq ans sans aucune connaissance, mais j’ai pris de l’assurance avec le temps. Bien sûr, je laisse dans la nature les trouvailles dont je ne suis pas certain. Commencez petit à petit et vous verrez que la confiance et le plaisir croissent avec l’usage!
Avez-vous des ressources à recommander?
Il existe une multitude de guides pratiques sur la cueillette sauvage! En voici quelques-uns pour commencer : Wild in Eastern Canada : A Guide to Foraging the Forests, Fields and Shorelines, les guides pratiques Peterson et Mushrooms of the Northeastern United States and Canada. (NdT – Quelques ouvrages en français : Champignons du Québec et de l’est du Canada et Forêt : identifier, cueillir, cuisiner). À mes débuts, j’ai trouvé un livre au sujet de la cueillette sauvage sur la côte est et je suis parti à l’aventure. On trouve également sur Facebook de nombreux groupes de cueillette et d’identification où les gens partagent des photos et de l’information. Ces ressources ont été essentielles pour moi. Sans l’aide de tous ces généreux Néo-Brunswickois, je n’aurais jamais acquis toutes mes connaissances.
Où peut-on faire la meilleure cueillette?
Il m’est arrivé de conduire pendant des heures et de marcher des kilomètres pour trouver des aliments sauvages, mais j’ai également déjà cueilli des espèces sauvages dans ma propre cour! Bien sûr, tout dépend de ce que vous recherchez, car la plupart des espèces poussent en symbiose avec leur environnement. Évitez toutefois les endroits populaires et le bord des routes.
Avez-vous des conseils à offrir sur la cuisine d’aliments sauvages?
Il est difficile de décrire la sensation de manger un fruit, un champignon ou des fines herbes fraîchement cueillis. Ils sont plus frais qu’au magasin et on sait exactement d’où ils viennent. Essayez d’intégrer un cèpe à votre plat de champignons favori ou bien des fruits sauvages à votre salade, ou même des feuilles de pissenlit à votre pesto! Voici votre chance d’être créatif et ingénieux. Si vous trouvez de la terre ou des insectes, il suffit de laver votre récolte et le tour est joué!
Avez-vous des conseils sur la cueillette sauvage en général?
Je vous recommande de faire votre propre recherche, par exemple sur YouTube et dans les groupes de cueillette. Or, la plupart des gens ne partagent pas les endroits où ils font leur cueillette, car ils ont sûrement mis des années à les trouver. Ne vous découragez donc pas si personne ne vous donne toutes les réponses.
À mes débuts, je suis parti dans la forêt avec mes connaissances de base et mon sac. En vérité, je ne faisais que déambuler dans le bois, mais quand on trouve un bon aliment, il est probable qu’on l’apercevra au même endroit d’année en année. Il est donc TRÈS IMPORTANT de faire une cueillette responsable. Un plant est facilement perturbé et épuisé, et une cueillette trop enthousiaste pourrait le tuer. N’oubliez pas que pour faire une récolte durable, on doit uniquement cueillir de 20 % à 40 % de ce qui est disponible.
ATTENTION! Certains fruits, plantes et champignons du Nouveau-Brunswick sont toxiques ou vénéneux. Certains champignons sauvages contiennent même assez de toxines pour causer la mort. (Il faut apprendre à identifier et éviter l’amanite vireuse, le pleurote en oreille et l’amanite phalloïde.)
Certains fruits, plantes et champignons ont des sosies toxiques qui peuvent rendre très malade.
Ne consommez jamais un aliment que vous n’avez pas identifié avec certitude.